PRIME, « MEDEF DES EMPLOYEURS »… DES PISTES POUR MUSCLER L’ATTRACTIVITÉ DE LA TERRITORIALE
La mission conduite par Philippe Laurent, Mathilde Icard et Corinne Desforges vient de remettre son rapport au gouvernement. Pour renforcer l’attractivité de la fonction publique territoriale, elle pousse à mettre en place une politique de rémunération “plus incitative”, notamment avec la création d’une prime d’attractivité fondée sur la stabilité de l’agent dans la collectivité.
Vingt-sept propositions pour renforcer l‘attractivité de la fonction publique territoriale, permettre aux employeurs publics locaux d’“attirer” et de “fidéliser” leurs personnels et, ainsi, permettre aux collectivités d’assurer la continuité de leurs missions. Voilà ce qu’expose la mission lancée sur le sujet par le gouvernement dans le rapport qu’elle vient remettre à la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin.
Son contenu va désormais faire l’objet d’un échange avec les associations d’élus et les syndicats de la territoriale, indique le ministère, en précisant que cet échange et les propositions du rapport “alimenteront utilement les réflexions en cours” de la Conférence sur les perspectives salariales dans la fonction publique, qui doit achever ses travaux début mars.
Lancée en septembre dernier, cette mission était, pour rappel, composée de 3 membres : Philippe Laurent, le maire UDI de Sceaux et président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CFSPT), Mathilde Icard, la présidente de l’Association des DRH des grandes collectivités (ANDRHGCT), et Corinne Desforges, inspectrice générale de l’administration.
Sans surprise, la mission confirme un constat souvent établi dans différentes études, celui de la baisse d’attractivité et de difficultés de recrutement dans la fonction publique territoriale, qui compte quelque 2 millions d’agents aujourd’hui. Ainsi 39% des employeurs territoriaux disaient-ils éprouver des difficultés à attirer des candidats en 2021, selon les résultats du dernier baromètre RH des collectivités.
Métiers en perte d’attractivité
Cette baisse d’attractivité “s’inscrit dans un contexte global de tensions sur le marché du travail affectant également les autres versants de la fonction publique et globalement l’emploi privé”, développe la mission, en relevant néanmoins des “difficultés propres” au versant territorial.
Des métiers “n’attirent plus”, indique la mission en citant les exemples du métier de secrétaire de mairie ou encore des métiers de la filière médico-sociale et de la filière administrative. Pour les métiers d’informaticien, d’ingénieur et de technicien, la mission relève aussi une concurrence “néfaste à des recrutements” avec le secteur privé, qui propose des salaires plus élevés.
Au-delà, la mission avance plusieurs facteurs pour expliquer les difficultés d’attractivité dans la territoriale : une “réelle méconnaissance” de ce versant, des rémunérations ayant évolué “faiblement ces dernières années”, des métiers fatigants, un management perçu comme “vieillot” ou encore une organisation “complexe” des concours qui n’est “pas toujours en adéquation avec les besoins des collectivités et les compétences des candidats”.
Priorité au sujet des rémunérations
Face à ce constat, la mission avance ainsi une série de propositions articulées autour de 3 axes. Premièrement, le “renforcement” de la place des élus et des exécutifs territoriaux au travers de la coordination des employeurs territoriaux. Deuxièmement, le “développement de la coopération et des initiatives y compris inter-fonctions publiques en faveur de l’attractivité de l’échelon local”. Troisième axe enfin, la suppression, via des mesures techniques, des différents “freins” à l’attractivité de ce versant.
Dans le détail, la mission recommande notamment, et c’est sa première proposition, de traiter le sujet des rémunérations en pratiquant une politique “plus incitative” en la matière, notamment sur le volet indemnitaire. Et ce alors que la valeur du point d’indice servant de base au calcul des agents publics est gelée depuis 2018.
“Le noyau de l’attractivité reste la rémunération”, insiste la mission dans son rapport, en soulignant que les mesures catégorielles ou sectorielles “ont contribué à désarticuler les grilles de la fonction publique territoriale nécessitant, en fin de compte, de revoir toutes les grilles et toutes les catégories”. Comme en amont des discussions sur le protocole PPCR (sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations) de 2015.
Faire évoluer la Coordination des employeurs territoriaux
Sur le plan indemnitaire en particulier, la mission pousse notamment à la mise en place de dispositifs “destinés à encourager le recrutement et la stabilité de l’agent dans la collectivité”. Elle recommande ainsi de lancer une réflexion sur la création d’une “prime d’attractivité”.
S’agissant de la place des élus dans les discussions intéressant la gestion des ressources humaines dans la territoriale, la mission propose de “mener une réflexion commune à l’ensemble des associations d’élus locaux sur le rôle et l’éventuelle évolution” de la Coordination des employeurs territoriaux “vers une structure de représentation unifiée de l’ensemble des employeurs territoriaux” pour ainsi les “impliquer pleinement” dans les négociations salariales. Une sorte de Medef des employeurs territoriaux, en somme.
Créée fin 2018 à l’initiative du président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et membre de la présente mission, Philippe Laurent, cette coordination “n’a pas encore trouvé sa pleine mesure” en raison de son caractère “informel”, est-il indiqué dans le rapport. La mission propose donc de la transformer en interlocuteur “officiel” du gouvernement et des organisations syndicales dans les négociations sociales.
Les autres propositions de la mission
• Créer un “fonds pour l’attractivité de la fonction publique territoriale” pour “inciter et aider les collectivités en zone de moindre attractivité à recruter”
• Faciliter l’accès au logement pour les agents territoriaux
• Communiquer sur une marque “Service public” déclinée sur les métiers de la fonction publique territoriale et informer sur ces métiers
• Fixer une clause maximale de réexamen de la nature des épreuves (trois ans) “afin de les adapter aux besoins réels des employeurs”
• Améliorer les conditions de travail des agents territoriaux en “leur fournissant un niveau de protection au moins similaire à celui des salariés” du privé