LE GOUVERNEMENT PRÉPARE UNE NOUVELLE LOI DE RÉFORME DE LA FONCTION PUBLIQUE
Après la loi de “transformation” de 2019, Stanislas Guerini prépare un nouveau texte de réforme de la fonction publique. Objectif affiché par le ministre : la rendre “plus attractive” et “plus moderne”. Ce projet de loi, dont le calendrier n’est pas encore connu, devrait aborder les questions d’accès, de compétences, de mobilités et, bien entendu, de rémunération et de reconnaissance du mérite.
Il y avait eu, en 2019, la loi “Dussopt” de transformation de la fonction publique, il y aura demain la loi “Guerini”. Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, prépare en effet un nouveau projet de loi de réforme de la fonction publique. Il l’a annoncé ce vendredi 1er septembre depuis l’institut régional d’administration (IRA) de Lyon, où il a prononcé un discours pour présenter “ses priorités de la rentrée pour la fonction publique et l’efficacité des services publics”.
“Je proposerai un projet de loi autour de quelques principes essentiels : mieux récompenser le mérite des agents, encourager et faciliter la mobilité de la fonction publique et mettre les compétences au cœur des parcours”, a-t-il déclaré lors de son discours de rentrée. Et le ministre le promet : “Je respecte le statut de la fonction publique”. “Mais, ajoute-t-il, le statut, ce ne doit pas être le statu quo.”
“Réformer la fonction publique, c’est mieux reconnaître le mérite, l’engagement, les compétences de chacun, c’est donner plus de sens au travail des nos agents”, a développé Stanislas Guerini à Lyon.
Pas de calendrier, mais le souhait d’“aller vite”
“Cette rentrée est un temps très important pour donner un cap politique et une nouvelle dimension aux chantiers que nous avons lancés, précise son entourage. Il s’agit maintenant de les opérationnaliser.” Référence notamment au grand chantier sur l’accès, les parcours, les carrières et les rémunérations dans la fonction publique. Un chantier annoncé par Emmanuel Macron durant la dernière campagne présidentielle, puis bousculé par la réforme des retraites et dont les conclusions devraient donc être désormais traduites dans un projet de loi.
En début d’année, pour rappel, l’équipe de Stanislas Guerini n’envisageait pas de nouvelle grande loi “Fonction publique” pour traduire les futures conclusions de ce chantier. “Selon les cas, nous allons soit modifier directement les choses en gestion, soit modifier les textes réglementaires et le moins possible par la loi”, indiquait alors l’entourage du ministre. Ce levier législatif aurait néanmoins pu être actionné “si nécessaire” dans certains cas, ajoutait-on.
“Plutôt que de dispatcher les mesures dans différents textes législatifs, nous souhaitons désormais donner plus de puissance, de cohérence et même d’incarnation et d’identification à cette réforme avec un projet de loi dédié à la fonction publique”, explique aujourd’hui l’entourage du ministre.
Pour autant, l’exécutif ne fixe pas encore de calendrier pour ce nouveau projet de loi de réforme de la fonction publique. Reste donc à savoir quand ce texte pourrait être présenté puis examiné par le Parlement, dont l’ordre du jour est déjà particulièrement chargé. “Dans tous les cas, nous souhaitons aller vite. On espère le construire dans les prochains mois et le présenter rapidement”, précise l’entourage de Stanislas Guerini.
Une fonction publique “plus moderne”
Objectif fixé par le ministre pour le futur nouveau grand texte sur la fonction publique : donner à celle-ci une “nouvelle couleur” et “en faire quelque chose de plus attractif et de plus moderne”. Avec ce projet de loi, l’exécutif entend ainsi attirer de nouveaux agents, dans un contexte de crise d’attractivité de la fonction publique, mais aussi valoriser davantage le travail des agents publics “en répondant à leurs envies” et en leur proposant de véritables trajectoires de carrière.
Ce texte, a précisé le ministre, abordera donc tout d’abord la question du mérite : “Je veux que nous refondions nos processus d’accès à la fonction publique, a-t-il souligné ce vendredi, en valorisant l’expérience professionnelle, la motivation et les connaissances du terrain, et pas seulement les compétences académiques ou le concours réussi à 20 ans.”
La future réforme sera aussi l’occasion pour le gouvernement d’aborder la question sensible des rémunérations des agents publics et notamment la reconnaissance de leur mérite. Durant la campagne présidentielle, pour rappel, Emmanuel Macron avait en effet promis de “rebattre les cartes de l’organisation de la rémunération dans la fonction publique”. Une ambition aujourd’hui confirmée par Stanislas Guerini : “Si nous voulons continuer à attirer et à garder les talents au sein de la fonction publique, nous devons aborder avec lucidité et ambition la question centrale des rémunérations.”
Mérites individuel et collectif
Pour “mieux reconnaître les mérites individuel et collectif, a-t-il développé, il faut rémunérer davantage l’agent qui aura fait plus, qui aura fait mieux” mais aussi “davantage rémunérer” les équipes mobilisées notamment en période de crise ou qui ont “collectivement mené à bien un projet complexe”.
Sur cet enjeu central des rémunérations, plusieurs hypothèses de réforme ont déjà été évoquées ces derniers mois par le gouvernement, dont la mise en avant de l’intéressement (personnel comme collectif), le développement de la rémunération au mérite, l’instauration de “garanties socles” ou encore la mise en place d’“accélérateurs de carrière” permettant de reconnaître l’engagement des agents publics. Autant de pistes qui avaient été évoquées en 2022 par les garants de la Conférence sur les perspectives salariales de la fonction publique : Jean-Dominique Simonpoli et Paul Peny – devenu ensuite le directeur cabinet de Stanislas Guerini.
Développement des mobilités
Deuxième ambition affichée par le ministre au travers de sa réforme : développer et faciliter les mobilités. À ce propos, l’exécutif souhaite en particulier “fluidifier” les parcours et les carrières pour notamment permettre de “passer plus facilement du terrain à l’administration centrale”, mais aussi d’un versant à l’autre de la fonction publique. Le futur projet de loi devrait également contenir des mesures relatives à la sortie du secteur public pour notamment faciliter les mobilités entre le secteur public et le privé. Des allers-retours public-privé qui ont déjà été facilités par la réforme de 2019. “Ce n’est pas un tabou de quitter la fonction publique, surtout si on y revient”, précise l’entourage du ministre.
L’exécutif compte en fin mieux reconnaître les compétences dans la fonction publique. Ce qui, selon Stanislas Guerini, nécessitera de faire passer la formation continue “à l’échelle” : “elle doit, a-t-il souligné, devenir un véritable levier d’évolution professionnelle pour l’agent comme pour la fonction publique en général”. Le ministre souhaite également remettre à plat les modalités d’évaluation professionnelle des agents publics pour “reconnaître les compétences acquises” et les “talents développés” par ces derniers. La réforme devrait par ailleurs aborder les questions centrales d’égalité professionnelle et de santé au travail.
Des syndicats à convaincre
Charge désormais au ministre Guerini de convaincre les syndicats, mais aussi les employeurs, de l’utilité d’une nouvelle réforme de la fonction publique. L’exécutif promet en tout cas déjà de travailler étroitement avec eux à l’élaboration de ce nouveau projet de loi. Les syndicats, quant à eux, espèrent ne pas revivre la mauvaise expérience de la loi de transformation de la fonction publique votée en 2019 sous l’impulsion du tandem Darmanin-Dussopt, insuffisamment concertée à leurs yeux alors qu’elle libéralisait le cadre statutaire.
La phase de discussions engagée par l’exécutif et Olivier Dussopt (alors secrétaire d’État) s’était in fine soldée par un rejet unanime de la réforme par les organisations syndicales. Un souvenir que les syndicats ne manqueront pas de rappeler à Stanislas Guerini mi-septembre à l’occasion de leurs échanges bilatéraux. Des échanges où il sera donc largement question de cette nouvelle réforme de la fonction publique, qui s’annonce aussi ambitieuse que sensible.