« LANCEURS D’ALERTE » DANS LA FONCTION PUBLIQUE : CERTAINES COMMUNES DOIVENT METTRE EN PLACE UN SYSTÈME DE SIGNALEMENT

Près de deux ans après la promulgation de la loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte dans la fonction publique, une circulaire vient d’être publiée hier afin de détailler le dispositif de signalement. Les communes de plus de 10 000 habitants employant au moins cinquante agents sont tenues d’établir une procédure interne de recueil et de traitement des signalements.

La loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte (n° 2022-401 du 21 mars 2022), dite loi Waserman, modifie un dispositif général de protection des lanceurs d’alerte qui existait déjà depuis la loi dite « Sapin 2 »  du 9 décembre 2016.

Cette évolution prend acte d’un rapport d’évaluation de l’Assemblée nationale de cette loi de 2016. Plus grande liberté dans la procédure de signalement pour les lanceurs d’alerte, protection de l’entourage, mesures de protection renforcées : la loi dite Waserman instaure surtout une obligation d’établir une procédure interne de recueil des signalements des alertes pour « toute personne morale de droit public ou de droit privé employant au moins cinquante agents ou salariés », sauf exceptions.

Pour rappel, un lanceur d’alerte est, selon la définition du Conseil d’État, « une personne qui, confrontée à des faits constitutifs de manquements graves à la loi ou porteurs de risques graves, décide librement et en conscience de lancer une alerte dans l’intérêt général ».

Une circulaire datée du 26 juin dernier et publiée hier sur circulaire.gouv.fr précise « le cadre juridique applicable aux « lanceurs d’alerte »  dans la fonction publique, les modalités de recueil des signalements et leur traitement ainsi que les garanties et protections dont bénéficient les agents ».

Procédures de signalement dans la fonction publique territoriale

Il est premièrement rappelé, dans la circulaire, quelles structures sont concernées par la mise en place obligatoire d’une procédure interne de signalement. Sont concernées pour la sphère territoriale, « dès lors qu’ils emploient au moins cinquante agents : les communes d’au moins 10 000 habitants, les établissements publics de coopération intercommunale comprenant parmi leurs membres au moins une commune d’au moins 10 000 habitants, les départements, les régions, les collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution et les établissements publics rattachés. » 

Pour ces personnes morales de droit public, cette procédure « est établie conformément aux règles qui régissent l’instrument juridique qu’elles adoptent ». Les communes concernées peuvent donc répondre à cette obligation de plusieurs façons : code de bonne conduite, charte de déontologie, note de service ou délibération pour les collectivités territoriales. « Cet instrument juridique est adopté conformément aux dispositions législatives ou réglementaires qui le régissent, et après consultation des instances de dialogue social »  notamment du comité social territorial, précise le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques.

En ce qui concerne l’organisation, il est précisé que « les communes et leurs établissements publics membres d’un centre de gestion peuvent confier à ce centre de gestion le soin de mettre en place une procédure interne commune de recueil et de traitement des signalements. »  Le décret du 3 octobre 2022 oblige les entités à mettre en place un canal de réception des signalements internes et à désigner une ou des personnes chargées de recueillir et de traiter ces signalements.

Le ministère recommande « que le référent déontologue soit désigné à la fois pour le recueil et pour le traitement des signalements, afin qu’il puisse non seulement recueillir les signalements mais aussi examiner leur recevabilité au regard des conditions posées par la loi et pour qu’il devienne le seul interlocuteur de l’auteur du signalement durant toute la procédure ». 
Dans les administrations de la fonction publique territoriale qui ne sont pas obligées de mettre en place cette procédure, comme les communes de moins de 10 000 habitants par exemple, « les signalements internes doivent dans ce cas être adressés au supérieur hiérarchique direct ou indirect de l’agent, à l’autorité territoriale, ou au référent désigné par l’employeur ». 

À noter : le signalement interne ne peut porter que sur des informations obtenues par l’intéressé dans le cadre de ses activités professionnelles et ne peut concerner que des faits qui se sont produits ou sont très susceptibles de se produire dans l’entité considérée.

Signalement au procureur de la République

L’annexe de cette circulaire publiée explicite l’articulation entre l’obligation de signalement des crimes et délits au procureur de la République en application de l’article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale, d’une part, et le dispositif d’alerte issu des articles 6 et suivants de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, d’autre part. Pour mémoire, cet article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale dispose que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République ». 

Pour effectivement informer le procureur, « le recours à une autorisation du supérieur hiérarchique n’est pas nécessaire »  mais « une intervention hiérarchique est possible »  et l’autorité supérieure peut s’acquitter de l’obligation de signalement. Cependant, « face à une abstention du supérieur hiérarchique, l’agent devra transmettre lui-même le signalement au ministère public. Le retour d’information est donc indispensable pour que l’agent public, qui a transmis à sa hiérarchie les éléments permettant de réaliser une alerte en application de l’article 40 alinéa 2 du Code de procédure pénale, évalue si celle-ci a bien pris les mesures levant sa responsabilité personnelle. » 

Consulter la circulaire