PRIMES AU SEIN DES COLLECTIVITÉS : LA JUSTICE MET LES POINTS SUR LES « I »

Faute de base légale, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse vient de suspendre la décision d’une commune de verser à ses agents une prime prenant en compte le nombre de leurs jours d’absence.

En dépit du principe constitutionnel de libre administration, les collectivités doivent respecter un certain formalisme pour verser des primes à leurs agents. C’est ce que vient de confirmer le juge des référés au tribunal administratif de Toulouse en suspendant la délibération par laquelle la commune de Tarascon-sur-Ariège avait instauré au bénéfice de ses agents une prime exceptionnelle qui prenait en compte le nombre de jours d’absence de chaque agent. La mesure avait été décidée par la municipalité “en l’absence d’augmentation ou de prévision d’augmentation du point d’indice” de la fonction publique en 2024.

La délibération en question avait toutefois été déférée devant la justice par le préfet de l’Ariège, pour qui la prime en question méconnaissait les dispositions réglementaires relatives aux régimes indemnitaires au sein des collectivités. “Les agents de la fonction publique territoriale ne peuvent bénéficier de primes et indemnités qui n’existeraient pas dans la fonction publique de l’État et leur montant ne peut être supérieur à celui versé dans la fonction publique de l’État”, expliquaient les services de l’État dans leur déféré.

La prime en litige, par ailleurs, “ne peut être rattachée à une prime existante vu ses modalités d’attribution, versée uniquement sur la base d’un critère lié à la présence de l’agent”, ajoutait la préfecture. Le juge des référés lui donne aujourd’hui raison.

Légalité questionnée

En défense, la commune de Tarascon-sur-Ariège faisait valoir que l’indemnité en question correspondait à la “prime de pouvoir d’achat exceptionnelle” créée par décrets en 2023 dans la fonction publique, “sans pour autant en adopter intégralement le dispositif comme il peut le faire en application du principe constitutionnel d’autonomie des collectivité locales”. Pour le juge, cependant, la commune concernée ne pouvait se reposer sur cette base réglementaire pour accorder une prime à ses agents en fonction du nombre de leurs jours d’absence.

Les textes instituant la prime de pouvoir d’achat, explique en effet le tribunal administratif, ne prévoyaient pas de possibilité de moduler son attribution ou son montant “en tenant compte de critères autres que ceux qu’ils prévoient”. En l’occurrence, être en poste en 2023 et percevoir une rémunération annuelle brute inférieure ou égale à 39 000 euros.

Aussi, en l’état de l’instruction, “le moyen tiré de ce que le conseil municipal de la commune de Tarascon-sur-Ariège ne pouvait instaurer par la délibération contestée une prime exceptionnelle pour l’année 2024 en prenant en compte le nombre de jours d’absence de chaque agent apparaît propre à créer un doute sérieux quant à sa légalité”, conclut le juge des référés, qui suspend donc la délibération en litige “jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur sa légalité”.